Les deux fonctions de la religion : donner du sens et éveiller
La religion, selon Ken Wilber, psychologue transpersonnel américain, « a toujours rempli deux fonctions très importantes mais très différentes l’une de l’autre ».
« D’un côté », nous dit-il, « elle agit de façon à créer du sens ». On pourrait aussi appeler cet aspect de la religion : la « religiosité ». Grâce aux mythes, aux contes et aux rituels, la religiosité console, protège et fortifie l’ego. Mais, ajoute Wilber, « elle ne change pas votre niveau de conscience. Elle ne vous offre pas la transformation radicale qui pulvérise complètement le sentiment d’être un moi séparé ».
Cet aspect de la religion consiste simplement en un moyen d’accéder à une grille d’interprétation enchanteresse visant à calmer la terreur inhérente à l’ego. La plupart des gens naissent pleins d’espoir et de peur, de désir et de désespoir, et il leur faut donner un sens à ce monde, un sens qui fasse civilisation et qui constitue le seul ciment social vraiment efficace.
L’autre aspect de la religion est la spiritualité. Là il y a transformation radicale et pulvérisation de l’ego. « Au lieu de consolation, la spiritualité apporte dévastation ; de contentement de soi, une explosion ; de réconfort, une révolution », écrit Ken Wilber.
L’ironie de cette phase de la religion, ajoute-t-il, c’est que, dans cette spiritualité qui transcende le moi, la religiosité est observée et mise en pièce… alors même qu’elle continue de remplir un rôle de conservation du sens, essentiel pour éviter toute dépersonnalisation prématurée et autres problèmes névrotiques ou psychotiques.
Ainsi la religiosité qui apporte légitimité au moi, et la spiritualité qui offre authenticité et entraîne la dissolution du moi sont-elles les deux sœurs ennemies inévitablement présentes au cœur de toute religion.
Reste à savoir si la spiritualité pourra être un jour assumée en dehors de la religion ?